A la dérive

(HRP : ceci est l'introduction au scénario qui sera joué ce week-end à Bruxelles ! Yo, il est temps de dire au Troll de venir rapidement visiter le site )

Le Tamatoe a glissé sur les volutes légères du vent, sans soucis particulier, croisant certes la route de quelques caravanes, dont certaines escortées par des Verdeux, mais pas un seul Oblique ne s'est intéréssé à eux.

Il faut dire que, s'ils avaient été renseignés par des espions sur la marchandise, c'est sûr qu'il devait encore se pâmer de rire dans un recoin. Finalement, le champignon était sans doute une arme redoutable contre les déboires commerciaux en voyage.

Finalement, le petit vaissair avait atteint Extrême-Aval, non sans quelques tiraillements à son bord, mais la capitaine Perséphone avait su tenir tout son petit monde tant bien que mal, même s'il lui était souvent venu à l'idée de jeter par-dessus bord l'insupportable râleur Yuki Asam Emer.



En fait, elle regretta amèrement de ne pas l'avoir fait quand, alors qu'elle escomptait vendre sa cargaison, ils s'aperçurent que des champignons avaient poussé SUR les champignons. Des champignons anthropophages... Par tous les vents, ça existait ? Perspéhone s'en persuada, pour sauver son honneur, mais à l'intérieur, force lui fut de constater que le marchand avait du lui refiler le fond de sa réserve, les champignons non écoulés de la rêv précédente, et qu'ils devaient déjà avoir ces maudits champignons en eux. Bref, elle s'était faire avoir (pas rouler, pour cela, il aurait fallu que le marchand l'ait fait exprès, et elle était persuadée que ce n'était pas possible. D'ailleurs, elle l'avait longuement expliqué à un équipage blasé, en leur promettant que le marchand les dédommagerait sûrement de cette mésaventure).


Mais au final, après avoir payé les taxes de l'Air-Port d'Extrême Aval, puis la vie de son équipage sur place (et certains ne regardaient pas à la dépendance, estimant que leur rang de Muage le leur autorisait), force fut de constater que les finances étaient bien basses et surtout, qu'elle n'avait plus assez de sels pour ne serait-ce même qu'acheter une nouvelle cargaison et tenter de se refaire.

Ils commencèrent même à songer à rompre là la charmante compagnie qu'ils représentaient, à vendre le Tamatoe, puis à voiler chacun de leur côté.

Aussi, ce soir là, quand Perséphone assista à une scène étrange, son intérêt s'éveilla vite. Elle dut faire beaucoup d'effort bien sûr pour essayer d'écouter en douce la conversation de la table d'à-côté, et ce, malgré la voix geignarde et râleuse de son Yuki, qui n'arrêtait pas de vouloir lui démontrer qu'elle n'avait pas été une très bonne capitaine.




-"Je te dis que le Fraimbois est en train de se déclasser. Il a pas le même goût ! Il ne faut surtout pas acheter de la dernière vendange, parce que c'est faire tromperie sur la marchandise ! Non, non, n'achètes aucun tonneau qui ne soit au moins daté et scellé d'il y a deux rêvs. Aucun."

-"Mais qu'est-ce que tu racontes ? Et comment sais-tu cela d'abord."

-"Et bien, tu te souviens de Nérwel ? Oui, mon cousin, au deuxième degrè. Il est commis, et où ça ? Je te le donne dans le mile : à la Maison Warnachaire. Oui, mon gars, exactement là où crèche le Maistre-Argentier Flochet, qui n'est autre, je te le rappelle, que le beau-frère de l'Echevin Prévôt des marchands de Spiritueux. Et donc, mon cousin, il a entendu le Maistre Argentier et l'Echevin s'inquiéter personnellement de la qualité du Fraimbois. Quand on sait que l'essentiel de leur commerce tient à ce vin ! Sans parler de ces nobles qui ont investi dans quelques ares de ce vignoble là-bas. Donc, mon cousin, il les a nettement entendu dire qu'il fallait garder le secret à ce sujet avant qu'une catastrophe commercial ne s'abatte sur l'Echevin et les vendeurs de spiritueux. Tu imagines bien de quoi je veux parler, hein ? Le Fraimbois redevenant une simple vinasse, le marché va s'effondrer ! Il doit y avoir un sacré problème, parce qu'il les a entendu dire qu'ils ne voulaient faire appel ni Bailli de Justice, ni au Centenier de Karf Dro... Non, ils cherchent à recruter très discrètement des gens capables d'aller voir là-bas, tout aussi discrètement, ce qui se passe. Tu vois, une sale affaire qui se prépare. Alors crois-en mon cousin et mon flair. N'investit pas un Sel ni une once d'or dans le Fraimbois tant que tout cela n'est pas devenu plus clair..."

Mais les deux sbires arrêtèrent leurs confidences quand Yuki, voyant le peu d'attention que lui portait sa capitaine, avait décidé de prendre une chaise, de la placer entre elle et la table voisine, puis de monter dessus pour se faire mieux entendre. Les deux individus, après un regard soupçonneux, se levèrent et changèrent de table.

Cette fois, Yuki menaçait de déclamer en public tous les reproches qu'il avait à l'encontre de la capitaine du Tamatoe. Pourtant Perséphone sourit.

Peut-être venait-elle de découvrir un bon moyen de se refaire.

Et ce nom de Fraimbois avait fait bondir ses oreilles. Un des meilleurs vins, fait dans le nord, sur les coteaux sud du Nourricier, vers son estuaire. Tout le monde en voulait, et surtout les étrangers, dont ces étranges personnages tout fragiles, longiformes et avec des oreilles pointues.
Qui plus est, un des sept Echevins d'Extrême-Aval, c'est-à-dire un responsable de tout un secteur du commerce, était impliqué... S'en faire un ami, ou du moins un éventuel investisseur de poids dans de futures affaires, ce n'était pas forcément une mauvaise idée... Quant au Maîstre-Argentier, voilà qui désignait un haut primat du clergé de Grîmalle. Peut-être que la Déesse apprécierait un coup de main, et ferait rejaillir la bonne fortune sur l'équipage à la dérive.

Alors que Yuki s'éclaircissait la voix, Perséphone aboya.

-"Ca suffit. Je suis sur une affaire. Je ne vous en avais pas parlé jusqu'à maintenant, car j'avais besoin d'une confirmation. Et oui, certains voudraient croire que je me tourne les pouces, mais pendant que vous buviez et dépensiez nos maigres ressources, j'ai trouvé quelque chose pour nous remettre en fond. Allez, prenez vos affaires : on y va."

Et joignant le geste à la parole, elle planta là un Yuki bouche bée, qui se hâta cependant de sauter de sa chaise, récupérer... un morceau de pain, puis de trotter en direction du capitaine, suivi par Ossamoelle, la Hordière et Adelweiss, leur Protectrice attitrée, au pelage d'une couleur ambre exceptionnellement rare.


Mais où donc les menait leur capitaine ? Quelle était son idée ?


Sans doute n'auraient-ils pas été très rassurés de savoir qu'elle n'en avait guère, si ce n'est de tenter sa chance, en priant Grîmalle pour que les propos de la conversation qu'elle avait surprise ne soient pas que paroles d'ivrognes, mais bien un renseignement précieux qui allait peut-être lui permettre de reprendre en main son bateau et son équipage...

Finalement, les propos furent confirmés lors de l'entretien entre le capitaine avec le Maistre-Argentier Paterne Flochet (il appartient à la hiérarchie du temple de Grîmalle, déesse tutélaire des Wols, déesse des marchands. On distingue le Grand Argentier, les Maistres-Argentiers, puis les Argentiers. Leur rôle est essentiellement, pour les marchands le souhaitant, d'assurer les échanges. Ils certifient la qualité et la valeur des marchandises de bout en bout, bien sûr contre rétribution. Ils garantissent ainsi, par exemple, la quantité exacte échangée grâce à de complexes systèmes de pesées et des procédures aux normes NWD 2207, qui permet de certifier que le vendeur achète bien exactement la quantité qu'il paie, à la qualité garantie par le temple). De fait, il fallait se rendre à l'évidence, la cuvée 459 était... moins bonne. Pas mauvaise, mais quand même très différente. Elle avait perdu la qualité qui en faisait la réputation.

Hors, le Maistre-Argentier l'a découvert en menant les opérations d'évaluation et certification de 80 tonneaux de 100 litres appartenant ni plus ni moins qu'à l'Echevin Warnachaire, le Prévôt des marchant de spiritueux (il existe 7 échevins à Extrême-Aval, chacun responsable d'un secteur du commerce. Nommés par leurs pairs, ils sont chargés du développement du marché, de la promotion et des arrangements politiques pour faciliter le commerce.). Hors, l'échevin Warznachaire est aussi le beau-frère du Maistre-Argentier qui se voit mal lui annoncer qu'il vient de perdre une fortune puisque les 8000 litres de vin de Fraimbois ne valent pas plus que 8000 litres d'un vin normal, bon, mais normal.

Bien sûr, le Maistre-Argentier Voilà donc notre équipage mandaté pour mener une enquête discrète sur les coteaux du Fraimbois pour tenter de comprendre la raison de cet... incident de millésime. Si en plus il y a une solution et qu'ils peuvent la mettre en œuvre, il saura se montrer reconnaissant. En effet, cela pourrait sauver les finances de son beau-frère, mais aussi celles du temple, car il a commis l'erreur de garantir le produit AVANT de l'avoir vérifié, tellement il était certain que cette production de Fraimbois serait à la hauteur des précédentes et du savoir-faire des vignerons et Maîtres de chais de ces coteaux.

Donc, l'équipage quitte la ville, préférant, sur décision du capitaine, prendre la vallée de Perok' Worn, quitte à rallonger le voyage de deux jours. Ce qui donnera un échange savoureux entre Yuki et la capitaine, car quand ils s'apercevront que dans leur hâte, ils ont oublié de charger... les vivres.

-"Vous avez décidé de prendre le chemin le plus long parce qu'on avait rien à manger. Je comprends mieux maintenant votre décision. C'est rudement bien pensé..."

Et de conclure en levant son petit poing : "mutinerie !"

Après une attaque de mantes obscures menées par un manteleur, ils purent achever leur voyage sans peine et parvinrent à Fraimbois. On notera de ce voyage que Ossamoelle, le Hordier, a tenu absolument à acheter des lapins et des poules pour assurer sa fonction de cuisinier de bord.
Bien sûr, que la bateau soit envahi de cages et autres cagettes, ne faisait pas parti de ses préoccupations. Et tandis que Yuki râlait, une fois de plus, concernant le respecte de sa fonction à bord (La vigie, ça, tout le monde y pense à me désigner, mais quand il faut se rappeler que je suis le Muage de bord, tout le monde oublie. La vigie, moi ça m'rend malade, mais tout le monde s'en fout, hein ?)
Aussi, quand Ossamoelle décida, tout de go, de fumer un lapin, Yuki ne put s'empêcher d'ironiser (j'peux prendre une taf'). Qu'il ait reçu une baffe à la place, cela fit bien rire le maigre équipage.

Donc, le Tamatoe finit par arriver à Fraimbois. Une courte rencontre à l'auberge avec leur contact local, l'Argentier Ragnacaire, leur permit de comprendre pourquoi le temple de Grîmalle ne lui avait pas confié l'enquête. S'enfilant dès 10h du matin, verres de vin de Fraimbois sur verres, le gros Wol était définitivement alcoolique, mais sympathique au demeurant.

Une brève enquête leur permit de confirmer ce qu'ils pensaient, à savoir que tout le village était au courant de la baisse de qualité du vin, mais personne ne voulait en parler. Une sorte de secret que tous gardaient ? Le mode de production du vin, sous forme de coopérative, excluait toute action des vignerons entre eux, puisque le système mis en place et la répartition des revenus de la vente du vin était particulièrement juste et garantissait à chacun sa part.
Pourtant, quelques informations filtrèrent qui laissèrent à penser que tout n'était pas si calme à Fraimbois.

D'abord, il y a ce sénateur, Ducatore, qui a hérité d'une grande parcelle de vignes et qui, contrairement aux habitudes, quand un "avalien" (surnom de "ceux" d'Extrême-Aval) achète du terrain, n'a pas voulu qu'il soit exploité par des locaux, des natifs de Fraimbois, mais a fait venir ses manus de sa ville. Pire, il interdit le passage par son domaine et ses gens chassent les importuns à coup de bâtons et de cailloux. Ce domaine a été acheté il y a deux rêvs, ce qui ne semble pas lié au problème, apparu sur la dernière cuvée seulement. Parce qu'il participe au système de production du vin de Fraimbois, il fut écarté l'idée qu'il puisse avoir intérêt à planter la production locale pour valoriser la sienne. Et puis, un Sénateur est un homme puissant, proche de l'autorité du Wor-Melnar, sans compter qu'il a en plus le titre de Potentat du Wor-Melnar auprès des Déserts d'Angoror de Dhun, c'est-à-dire un Ambassadeur.

Autre fait, incompréhensible, les volailles et autres lapins élevés par les habitants, ont tendance à disparaître dans des proportions ennuyeuses, de l'ordre d'une petite dizaine par nuit, sans qu'on retrouve les corps. Y aurait-il un étrange prédateur dans la région ? Ou comme le capitaine l'a suggéré, une armée d'Ekes qui se nourrirait ainsi. Ce qui lui a attiré au passage les ricanements de Yuki qui imaginait bien, en effet, 5000 Ekes se nourrissant de 10 poules par jour...

Aussi étrange, même si pouvant paraître lié aux événements, ils découvrirent que, depuis huit mois, des morceaux de vignes avaient été arrachés, apparemment au hasard, sur de petites surfaces, essentiellement sur les hauts des coteaux, à la lisière de la forêt, dont la fameuse Vigne du Vieux Chêne, qui semblait avoir une place particulière dans le cœur des villageois et vignerons.

Enfin, on notera la présence depuis quelques jours d'un individu peu apprécié, un certain Scipione Vagaperta, qui s'est présenté comme un serviteur du Sénateur, et qui dort d'ailleurs au domaine. Il traine, il fouine, on le soupçonne d'être le voleur de poules ("il doit avoir trés faim", a commenté Ossamelle), mais surtout, on a laissé entendre qu'il avait un peu trop tendance à mater par dessous ses sourcils, la jeune et belle Pétronille, la fille du bourgmestre.

Fort de toutes ces informations, l'équipage devait décider d'un plan d'action, mais il doit d'abord honorer de sa présence l'Agentier qui l'a invité à un dejeuner avec le gratin de la communauté de Fraimbois.

Les rumeurs seront pour la plupart confirmés. Ils apprendront cependant que les villageois sont inquiets par l'arrache de vignes - un vrai sacrilège - et qu'ils montent des gardes de nuit, mais inefficaces jusqu'à présent. Quant à la baisse de qualité, chacun y va de son explication tellement identique qu'elle semble bien rodée, pour ne pas dire préparée. Le temps serait la cause de la baisse apparente de la cuvée 459. Mais chacun put sentir que le village cachait quelque chose.
Le Yuki, lui, préféra s'intéresser à la jeune Pétronille présente, qui lui parla de la vieille légende romantique et tragique du vieux chêne. Le dernier Seigneur de Fraimbois, marié, tomba amoureux d'une magnifique Wol qui errait dans les bois sur le haut de la colline. Quand sa femme mourut de chagrin d'être délaissé, lui-même alla mourir dans les bras de son aimée, qui disparut avec lui dans un vieux chêne, celui-là même qui donne son nom à la vigne qui fut arrachée. C'est une belle histoire non ? En tout cas, elle fait se pâmer la jeune damoiselle romantique qui rêve de princes charmants.

Et avouons que côté prince charmant, elle n'est pas servi par le Yuki... Qui résuma ce rejet en affirmant au capitaine : "c'est parce que je suis petit et noir."

Le repas terminé, il va falloir maintenant décider des actions à mener... Ce qui n'est jamais très simple à bord du Tamatoe.

Mais qui le fut bien plus que d'habitude. Renforcés par le jeune Tony, un guide dans l'œil duquel Ossamoelle allait taper involontairement, l'équipage se dirigea vers la Vigne du Vieux Chêne pour étudier les façons employées pour saccager les vignes.

Mais sitôt arrivés, une ombre dans les bois les observant inquiète le Protecteur Adelweiss qui laisse filer une hélice dans les bois. Quelques minutes après, force est de se constater qu'il a tué Scipione Vagaperta qui s'était caché là pour des raisons inconnues.

Après une légère discussion, Yuki préférant larguer le corps au milieu des marais, Adelweiss parvient à ce que le capitaine accepte de rapporter l'affaire aux autorités. Il ne faudrait pas qu'on puisse dire, ensuite, qu'à bord du Tamatoe, il y avait des assassins, n'est-ce pas ?

Finalement, après avoir récupéré dans cette vigne aux allures sauvages particulières, qui semble comme sortir d'un chêne immense et vieux, au tronc si épais qu'il faudrait 12 wols se tenant la main pour en faire le tour, des petits instruments grossiers, qui laissent entendre que les auteurs sont soit des enfants, soit tous petits, l'équipage envoie une petite excursion dans les Bois du Chesnois pour aller voir une autre vigne saccagée non loin et se faire une idée sur un autre lieu.

Ossamoelle repérant des petites traces de pas griffus dans une vieille flaque d'eau sèche, ils décident de se séparer. Avec le Protecteur, elle les suit tandis que Yuki mène on enquête sur le deuxième lieu. Il constate la même méthode, même si la vigne est beaucoup plus classique ici qu'ailleurs.

Finalement, le bateau part récupérer au sud ceux étant partis dans cette direction et qui ont pu remonter les traces jusqu'à ce qu'elles disparaissent dans le Marais de Mésaisié.

C'est alors que le Yuki eut l'idée de vouloir survoler les marais pour y voir d'éventuelles torches, ce qui lui valut une remarque amusée du Protecteur, lui demandant qui aurait l'idée d'allumer des torches... en plein jour ?

Cependant, cette petite expédition leur permit d'entrevoir, sur le sud-est, des ruines d'un pont-fortifié sur le bras du fleuve Nourricier menant au Marais, ainsi qu'un promontoire rocheux sur lequel se dresse celles d'un château. Nul doute qu'il s'agit là de celles de l'ancien Seigneur, car quoi de plus normal que de protéger les coteaux de Fraimbois des marécages depuis cette position clé qui en contrôle les sorties ?

Après un retour bref au village, où ils reçoivent ordre de ne pas quitter le Fraimbois, le temps que le bourgmestre face venir le Centenier (autorité judiciaire locale), ils mènent le corps chez l'Embaumeur Mummole, un vieux Wol acariâtre, au faciès aplati de chiwawa. Parce qu'ils montrent beaucoup de respect pour le mort, sur les conseils judicieux, pour une fois, de Yuki, ils parviennent à discuter avec lui et découvrent quelques mystères locaux.

Ainsi, il est de coutume à chaque fête des Vendanges, fête pendant laquelle un tonneau de Fraimbois de l'année en cours est mis en perce, qu'une procession, chantant des chants paillards ("c'est à boire, à boire qu'il nous faut..."), mène le premier verre tiré sur une vieille pierre qu'ils arrosent. L'équipage apprend qu'il s'agit de la tombe de Milésine, l'épouse du Seigneur de Fraimbois. Accédant au Codex Nécropolis, sorte d'état-civil inversé tenu par les Serviteurs du Dieu de la Mort, où sont consignés chaque décès et beaucoup des vies des personnes pour éventuellement que le Seigneur Juste puisse y vérifier quelques assertions des âmes venant se présenter en sa Justice, ils découvrent que cette épouse eut une vie triste. Délaissée par son Seigneur pour une Wol magnifique qui semblait vivre dans la Forêt du Chesnois, il finit par mourir en couche, seule, trois rêvs après son mariage. Elle donna naissance à deux jumeaux qui n'eurent pas de descendance et qui conclurent la lignée des Seigneurs des Fraimbois. Mais surtout, ils découvrirent qu'une page entière du codex avait été arrachée, celle faisant référence aux dernières heures de Milésine et surtout aux paroles qu'elle prononça sur son lit de mort pour maudire son mari. Ils apprirent en effet qu'ensuite, chaque rêv, le fantôme de l'épouse abandonnée se mit à venir hanter son mari, exigeant que soient respectées ses dernières paroles. Le Seigneur s'entêta à refuser, vieillissant à vue d'œil chaque rêv après chaque nuit passée avec ce fantôme, précisément au soir de la Fête des Vendanges. Mais bientôt, le fantôme se mit aussi à harceler les habitants et ces derniers, bien au fait des dernières volontés de la morte, se mirent à vouloir y répondre seuls. Hélas, le Seigneur décida de s'interposer et lors d'un bref mais violent affrontement entre eux, il fut tué par ses propres sujets. Mais ces derniers s'en repentirent et Mummole se souvenait que de ce jour fut créée la procession de la Fête de la Vendange. Il confirma que la dernière s'était déroulée selon les habitudes, qu'il détestait d'ailleurs car il n'aimait guère cette fête ridicule venant troubler le repos des morts de sa Nécropole. Mais surtout, ils surent que trois Paladins du Dieu de la Mort étaient venus il y a une rêv entière environ, pour s'intéresser au passé de la région et qu'ils avaient longuement lu le Codex Nécropolis. Mais de là à penser qu'ils en auraient arraché une page, c'était une chose inconcevable. Du moins pour l'Embaumeur Mummole, pas pour l'équipage du Tamatoe.

Finalement, à peine sortis, ils décidèrent de se rendre aux ruines. Ils eurent la surprise de constater qu'un trébuchet, construit sur le pont fortifié, était en train de tenter de détruire les restes des ruines du château. Décidés à comprendre ce qui se tramait ici, ils se posèrent aux lisières sud de la Forêt du Chesnois, pour kidnapper un des petits êtres autour du Trébuchet et le faire parler. Mais bon, de fil en aiguille et surtout de chutes dans la rivière à chutes dans la rivière, ils finirent par nettoyer le pont de sa petite garnison de huit Tans, portant des uniformes des armées Ekes. Ils chassèrent la créature gigantesque qui portait les pierres, mais ne purent la tuer. Ne comprenant pas trop ce que ces soldats venaient faire ici, ils décidèrent de remonter vers le château.

Au passage, ils éclaircirent le mystère des poules et lapins disparaissant, car la garnison en possédait quelques-uns. Ainsi donc, Yuki dut reconnaître que la capitaine avait eu raison : les vols de nourriture étaient bien du fait d'une armée Eke d'invasion. Bon, peut-être pas de 5000, mais quand même, une force militaire.

Parvenus au château, une rapide inspection leur permit de voir que les Tans avaient vécu ici mais l'avait aussi quitté précipitamment. Ils devinèrent que ces derniers avaient du faire quelque bêtises et sans doute réveiller un danger ici. Avec précaution, ils explorèrent, découvrirent un escalier descendant qui les mena jusqu'au caveau de la famille du Seigneur de Fraimbois. Après un combat épique contre des dizaines de zombies et squelettes, ils parvinrent finalement dans la crypte du Seigneur. Mais ils se refusèrent de tenter quelque chose, au regard de leur état de santé, et partirent chercher l'Embaumeur. Après tout, les morts, n'était-ce pas sa spécialité.

Grâce à lui, ils purent parler au Seigneur de Fraimbois même. Ce dernier les menaça de mille morts, et surtout de les pourchasser jusqu'aux confins du monde (menace que la dizaine de molosses squelettiques, jaillis de sa tombe avec lui, confortait), s'ils n'exécutaient pas ce qui était nécessaire au repos de son âme : chasser les Tans qui l'avait réveillé en voulant piller les tombes, vaincre le Gyrovague Cholaloga, le Paladin d'Yrotz qui les dirigeait et était responsables du réveil du fantôme de Dame Milésine, et enfin, replanter la Vigne de Sevaenae, même s'il ne précisa pas de quoi il parlait et comment il fallait faire.

Cependant, une étude attentive des fresques autour permit de comprendre qui était la jeune et belle Wol qui avait charmé le Seigneur : ni plus ni moins qu'une créature enchantée, une Dryade qui vivait dans les arbres. Du coup, la légende disant qu'à sa mort, le Seigneur avait été emporté dans le Vieux Chêne par son Aimée trouvait corps et ils comprirent que la Vigne de Sevaenae désignait sûrement la vigne sauvage du Vieux Chêne. Que la vigne tire sa force et son goût des pouvoirs d'une Dryade endormie ou morte de chagrin, voilà sans doute qui expliquait le coup si merveilleux du vin de Fraimbois, goût perdu à cause de l'arrachage de la vigne.

Il ne manquait que de comprendre en quoi cela agissait sur Milésine.

Ils retournèrent donc au village et montèrent donc une expédition avec les villageois pour entrer dans les marécages où, ils n'avaient aucun doute, devait résider les Tans et surtout les auteurs des manigances.

La bataille fut épique (il y avait une compagnie d'une bonne centaine de Tans), beaucoup risquant la mort, certains la trouvant (13 villageois quand même). On passera sur les mésaventures de Yuki qui tenta de piller la tombe d'un vieux Seigneur et dut combattre une Ombre et une Goule. Il faillit payer son avidité de sa vie et ne dut qu'au courage de la capitaine, pourtant épuisée et blessée par le long combat, de ne pas devenir à son tour une Ombre. Cependant, ramenée de loin tardivement, il devait en garder une grande faiblesse physique... qui allait sans doute faire son affaire dans les temps à venir, car il était devenu bien trop faible pour les manœuvres à bord, sans parler du travail...

Finalement, ils vainquirent le Gyrovague et découvrirent dans ses papiers la page manquante du Codex Nécropolis, ainsi qu'une lettre de mission. Du Codex, ils comprirent que l'épouse délaissée, sachant que son mari retrouvait sa maîtresse dans les bois, l'aimant toujours, mais détestant celle qui l'avait charmé, eut pour derniers mots : "Aucune boisson ne me rassasiera autre qu'un vin du Chesnois". Peut-être que mourir en vers était un archétype de la noblesse ? Ils comprirent la subtilité de la dernière volonté qui imposait, pour que ce vin existe, de défricher la forêt du même nom pour y planter des vignes... Ce qui revenait à abattre tous les arbres et donc la demeure de la Dryade. Mais plusieurs annotations successives permirent de comprendre que, le coeur triste d'avoir blessé mortellement leur Seigneurs qu'ils aimaient, les villageois avaient été aussi touchées par la beauté de la Dryade. Ils lui demandèrent comment faire pour résoudre les dernières volontés de Milésine, sans attenter à sa vie. La Dryade leur dit alors de planter une vigne au pied de son chêne. L'amour véritable et non magique qu'elle avait pour le Seigneur de Fraimbois ferait le reste et ainsi ils auraient du vin du Chesnois, car c'était la seule vigne autorisée aux lisière de la forêt. Un rapide croquis montrait d'ailleurs cette lisière, les parcelles et c'est ainsi qu'ils comprirent que toutes les vignes qui, au cours du temps qui passe, furent plantées au-delà de cette lisière, avaient été saccagées par les Tans. Oui, le but était donc bien de détruire la production de vin du Chesnois, pour réveiller le fantôme de Dame Milésine.

Mais pourquoi ? La lettre de mission était trop évasive pour comprendre. Adressée à Sa Férocité Thrasamund, Légat Mortifère des DV, Elle disait :

"Votre Férocité,

Louons Notre Très Bas Seigneur Désséché ! Sa bénédiction s'étend sur le Chapitre d'Ivoire et le Trône d'Os.

Nous, Servilio, Nécrophore de l'Ossuaire de IM, Supérieur consacré du Chapitre d'Ivoire pour le WM, nous donnons pleine licence à notre loyal ministre, le Gyrovague Cholaloga pour mener une opération de guerre clandestine et de déstabilisation dans la région du Fraimbois.

A cette fin, vous lui déléguerez le commandement d'une petite force dont vous voudrez bien fixer le volume avec lui.

Puissiez-vous trouver la Paix au jour et à l'heure.

Servilio, Nécrophore du ChI"

Tout était plié et une bonne nouvelle n'arrivant pas seule, il leur fut annoncé que le Sénateur Ducatore ne souhaitait pas qu'on s'étende davantage sur la mort tragique de son serviteur, et qu'il décidait de ne pas porter l'affaire en justice. Le capitaine et ses hommes comprirent que ce domaine étrange voulait certainement conserver sa tranquillité. Pourquoi ? Là aussi, les questions n'avaient pas de réponse, mais personne n'avait envie d'enquêter sur les volontés d'un Sénateur, n'est-ce pas ?


Il ne restait plus désormais qu'à retourner voir le Maistre Argentier pour recevoir rétribution et sans doute discuter longuement de cette étrange lettre de mission, de ce Chapitre d'Ivoire...


Peut-être de nouvelles aventures en perspectives pour le Tamatoe et son équipage héroïque ?